Le dire ou pas?
Chaque personne vivant avec le VIH a été confrontée à ces questions épineuses. Devrais-je le dire? Dois-je le dire? Et à qui?
Ensuite se pose la question du comment. Est-on prêt à en parler? De quelle manière vais-je aborder le sujet avec telle ou telle personne?
Dévoiler que l’on vit avec le VIH ne doit pas être pris à la légère. Dévoiler que l’on vit avec le diabète à sa famille, ses amis, ses collègues de travail suscitera chez la plupart la compassion. En revanche, dévoiler son statut sérologique au VIH risque de causer un malaise, des questions et du jugement.
De par ses modes de transmission souvent synonymes de prises de risque et d’insouciance, un nouveau diagnostic peut faire l’objet d’incompréhension après de nombreuses années de prévention et d’éducation, surtout en 2017.
Comment peut-on en 2017 s’infecter avec le VIH ? Cela fait plus de 30 ans qu’on en parle, tout le monde devrait savoir de quelles manières se transmet le VIH, non?
Le dévoilement de son statut sérologique peut avoir des répercussions importantes dans sa vie personnelle, familiale, sociale et professionnelle. De plus, les aspects légaux et les textes de loi complexifient le partage de cette information dans nos rapports intimes.
Tout comme faire le « coming out » de son homosexualité par exemple, dévoiler son statut sérologique doit rester un choix personnel. Aucune situation de la vie quotidienne n’oblige une personne à dévoiler son statut sérologique. Cependant, cela ne s’applique pas lorsqu’on souscrit à une assurance (assurance collective, assurance vie). Dans ce contexte, il est obligatoire de dévoiler, car une fausse déclaration pourrait être considérée comme une fraude dont tous les assureurs seraient informés et entraînera l’annulation de la police sans possibilité de récupérer l’argent investi. Dans le domaine de l’immigration, le test de dépistage peut amener à un dévoilement obligatoire du statut sérologique.
Dans un contexte de criminalisation, où la responsabilité de parler du VIH repose sur les épaules des personnes séropositives, est-il préférable de garder cette information pour soi lors de relations sexuelles?
Selon l’état du droit canadien, pour éviter d’être accusé au criminel et de croupir en prison durant des années, il est aussi obligatoire de dévoiler son statut à tous ces partenaires sexuels sauf lorsqu’on porte un condom et qu’on a une charge virale sous le seuil de 1 500 copies. Ce fait est en sorte une arme à deux tranchants qui nous oblige, dans le contexte sexuel, à se dévoiler au risque d’être rejeté. Et ne pas le faire peut être une source de grand préjudice : la prison et l’étiquette d’agresseur sexuel pour le reste de ses jours.
Et puis, doit-on vraiment en parler? Est-ce que tout le monde doit être au courant?
Parce que les mythes sur le VIH sont persistants, parce que les fausses informations fourmillent toujours sur le net, et parce que le faible niveau de connaissance de la population en général rend le dévoilement plus difficile à faire, faire un dévoilement implique souvent de devoir faire l’éducation des personnes à qui on communique l’information. Alors mieux vaut avoir les bonnes informations sous la main afin de répondre aux questions et d’être en mesure de gérer les émotions vécues par son entourage, y compris les siennes.
Vivre avec le VIH aujourd’hui n’est plus, heureusement, ce qu’il en était au début de l’épidémie; les avancées scientifiques et pharmacologiques permettent une espérance de vie semblable à celle d’une personne séronégative; la qualité de vie est bien meilleure; reste que le diagnostic de VIH n’est pas une nouvelle facile. Tant que les personnes vivant avec le VIH feront face à la discrimination et la stigmatisation, la question du dévoilement restera complexe.
Bref, le dévoilement de son statut sérologique doit rester une décision personnelle en tout point. Se lancer dans un dévoilement sans y avoir consacré un temps de réflexion suffisant peut s’avérer une expérience négative. La personne la mieux placée pour savoir si le moment est bien choisi pour se dévoiler est la personne elle-même, et personne d’autre.
Sylvain Beaudry
Ce texte est une version bonifiée par l’auteur de son témoignage publié dans l’édition no 25 de Remaides Québec.
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